Terre de Lin : « Nous voyons l’avenir avec plus de sérénité. »
« Il y a un an, le lin était à son apogée, nous étions loin d’imaginer ce qui allait arriver. Aujourd’hui nous n’en sommes pas sortis mais nous avons vécu un scénario moins noir que ce que nous avions imaginé », a déclaré le président de Terre de Lin, Guillaume Hemeryck, lors de l’assemblée générale qui s’est déroulée en streaming le 4 février dernier.

« Nous sommes encore dans une zone de turbulence mais nous voyons les choses avec plus de sérénité ».
Le 17 mars 2020, les teilleuses s’arrêtent complètement durant un mois et demi, 250 salariés sont renvoyés chez eux. Fin avril, il est décidé de remettre les teillages en route à peu près pour un tiers de l’activité. La coopérative tournera à un rythme de 30 à 40 % jusqu’à la fin juillet. « A l’époque, la volonté première est de sauver les recettes des adhérents et de préserver toutes les forces financières et humaines pour être prêt à redémarrer. Nous avions imaginé le scénario où nos activités restaient réduites jusqu’à la fin 2020. Finalement les choses se sont améliorées », précise le directeur Thierry Goujon. En Chine le problème sanitaire a été résolu plus rapidement qu’en Europe et le marché du lin a continué à se développer.
« Nous sommes encore dans une zone de turbulence mais nous voyons les choses avec plus de sérénité », ajoute Guillaume Hemryck. Le teillage de la récolte 2019 devrait se terminer courant avril. Avec une moyenne de 7,5 tonnes de paille et 1,7 tonne de fibres/ha, elle est correcte techniquement, dans la moyenne des années précédentes. Aujourd’hui, avec les ventes déjà engagées, le prix de vente moyen estimé se situe autour de 2,30-2,40 euros.
Aucun prélèvement de comptes bloqués
Au sein de l’union Comlin (Terre de Lin, Agylin et la coop du Neubourg), 31 724 tonnes ont été commercialisées, soit 28 % de moins que sur l’exercice précédent.
Les ventes réalisées en fin d’année 2020 et les perspectives du début d’année 2021 permettent de prévoir une recette finale pour le producteur de 3 700 euros/ha en lin roui non battu. Avec 500 euros de recettes en plus pour les producteurs de semences. « Nous étions loin d’imaginer ces chiffres il y a quelques mois », ajoute Guillaume Hemeryck.
La recette va être bonne mais avec la baisse d’activité de 2020, il y aura un décalage de financement dans les exploitations. Le conseil a donc pris des mesures exceptionnelles : il n’y aura aucun prélèvement de comptes bloqués sur la récolte 2019 mais également sur celle de 2020.
Une activité semences record
L’activité semences, quant à elle, a été maintenue et un volume record de 8000 tonnes a été vendu pour les semis 2020. Au niveau de l’activité semences, l’année 2020 a vu le rachat par Terre de Lin de l’activité de sélection et de recherche traditionnelle de lin de Limagrain. En parallèle, le semencier a proposé à la coopérative de poursuivre ensemble sur un axe de génétique moderne avec de nouvelles technologies. Pour revenir sur la production de semences, le procédé Thermosem mis en place il y a 3 ans donne entière satisfaction. Au vu des très bons résultats de levée, la production sera accélérée en 2021 avec un objectif de 80 % de semences traitées à la vapeur.
Le chiffre d’affaires de l’exercice 2019-2020 a baissé de 29 millions pour atteindre 90 millions d’euros. Cette baisse est en partie liée aux volumes (23 % de fibres de moins vendues sur l’exercice) et au prix (13 % de baisse). Le chiffre d’affaires semences a quant à lui était record. Avec 327 000 euros, le résultat de la coopérative a néanmoins été sauvé. Il était de 782 000 euros l’année précédente.
La récolte 2020 fut financièrement très compliquée.
En ce qui concerne la récolte 2020, les premiers lots teillés montrent de petits tonnages de paille (5,5 tonnes en moyenne) et de mauvaises richesses.
Il y a des différences importantes entre les régions. Au-dessus de la Seine, les régions de Vittefleur et de Saint-Valery-en-Caux présentent de meilleurs résultats techniques que la région Dieppoise et la Somme. Dans l’Eure, les régions Lieuvin et Roumois s’en sortent mieux que le Sud du département. Les disparités vont de 2 tonnes à 6,5 tonnes dans les meilleurs secteurs : « Nous avons de grosses déceptions sur des lins que nous avions vu corrects mais qui ont été enroulés dans des conditions humides. Au final, les rendements se situeront autour de 16 %. Si on se projette, avec 8 ou 9 balles de filasse, l’estimation de recettes fibres sera de l’ordre de 1500 euros/ha avec une fourchette allant de 0 à 3 000 euros. Nous cherchons des moyens pour limiter l’impact de ce mauvais coup de la nature auprès des adhérents ».
Théoriquement, cette récolte 2020 devrait être terminée en mars 2022, avec l’éventualité de teiller la récolte 2021 avant si nécessaire. Pour les semis 2021, la coopérative annonce une baisse des prévisions de surfaces de 37 %.
Depuis juillet 2020, le niveau d’activité des filatures est de l’ordre de 70 % et ce rythme devrait se poursuivre dans les mois qui viennent. « La demande finale devrait donc se maintenir aux deux tiers de ce que l’on avait il y a un peu plus d’un an. Cela correspond au niveau des années 2014 et 2015, ce qui est tout à fait correct. Nous pensons qu’il y aura une petite tension sur l’offre, en attendant que la récolte 2021 arrive sur le marché mais il y aura assez de lin pour alimenter la filière. Dans ce contexte nous prévoyons que les prix se maintiendront dans les mois qui viennent, dans une fourchette située entre 2,20 et 2,40 euros. C’est assez inespéré au regard de la situation », reconnaît Thierry Goujon.
C.H.