GEAU 76
La Seine-Maritime a son association d’irrigants
GEAU 76 permet la présence du monde agricole au sein des comités sécheresse et la prise en compte des problématiques des irrigants dans l’élaboration des textes réglementaires.
GEAU 76 permet la présence du monde agricole au sein des comités sécheresse et la prise en compte des problématiques des irrigants dans l’élaboration des textes réglementaires.
« De plus en plus d’agriculteurs de Seine-Maritime s’intéressent à l’irrigation. Notre association a vocation à être un centre de ressources pour répondre à leur questionnement », explique Samuel Crèvecœur, président de l’association des irrigants de Seine-Maritime, GEAU 76, et agriculteur à Tocqueville-sur-Eu.
L’association regroupe tous les utilisateurs d’eau : ceux qui irriguent, ceux qui épandent des eaux de sucrerie et les éleveurs qui ont un forage pour abreuver leurs animaux. Elle a été créée le 10 juin 2020, avec la FNSEA 76 et la Chambre d’agriculture. « L’idée est de réunir tous ceux qui prélèvent et utilisent de l’eau dans un objectif agricole », ajoute le président.
Un représentant des agriculteurs irrigants au comité sécheresse
Aujourd’hui il y a 23 adhérents au sein de GEAU 76 qui est animée par Bérengère Girard depuis un an. « Notre mission est de représenter les exploitants qui prélèvent de l’eau auprès des services de l’État. Nous avons maintenant ainsi un poste au sein du comité sécheresse qui se réunit quand les conditions climatiques sont critiques. Avec les associations, la Chambre d’agriculture, les pêcheurs, les collectivités et services de l’État, il s’agit de parler de la sécheresse et de trouver des solutions pour gérer la situation. Nous avons également un rôle à jouer sur l’élaboration de l’arrêté-cadre sécheresse afin de prendre en compte les besoins en eau de l’agriculture et la nécessité de concilier les différents usages », explique l’animatrice.
Avoir une bonne gestion, c’est entre autres utiliser des outils d’aide à l’irrigation. L’association propose Net-Irrig à ses adhérents. Cet outil permet de suivre la réserve en eau disponible pour différentes cultures. Il se base sur la méthode du bilan hydrique et permet d’optimiser les dates de déclenchement de l’irrigation en fonction des prévisions météorologiques locales.
« L’utilisation de Net-Irrig m’a montré que j’irriguais souvent trop tard. La plupart du temps, nous démarrons l’irrigation alors que la plante est déjà en souffrance. L’outil me permet de déclencher au bon moment », précise Samuel Crèvecœur qui est producteur de pomme de terre.
Des outils pour gérer l’irrigation
Paul Lheureux est quant à lui producteur de pommes de terre près de Luneray. Il est vice-président de l’association GEAU 76. Environ 50 % de sa sole en pomme de terre est irriguée.
« Nous avons fait le choix d’être un peu suréquipé en enrouleurs, ce qui nous permet de n’irriguer qu’en fin de journée et la nuit et d’être ainsi moins soumis au vent. La répartition de l’arrosage est meilleure et il y a moins de gaspillage d’eau. Aujourd’hui les irrigants sont montrés du doigt mais il faut savoir que nous irriguons pour répondre aux attentes des consommateurs ». Samuel Crèvecœur ajoute : « Par exemple, Lunor attend des pommes de terre dont le taux de matière sèche est inférieur à 22,5 %. Grâce à l’irrigation je peux répondre à ce marché. Le seul moyen de réguler la matière sèche est d’apporter de l’eau mais des outils tels que Net-Irrig existent maintenant pour gérer notre irrigation ».
Informé sur la date de plantation, l’outil numérique relié à la station météo la plus proche avertit quand l’irrigation est à déclencher. Chaque fois que l’agriculteur fait une passe d’irrigation il en informe le logiciel.
Paul Lheureux s’est également équipé d’une sonde tensiométrique. Le fonctionnement est différent. Nous sommes là sur une prise en compte plus spécifique de la parcelle : « On plante la sonde dans le sol avec un pluviomètre au-dessus. La sonde envoie un champ magnétique à plusieurs horizons, 20 cm, 40 cm et 60 cm, et informe sur le niveau hydrique de chacun. C’est l’hygrométrie du sol qui déclenche l’irrigation ou pas. Je dois renseigner la nature de la culture, la date de plantation et la variété. C’est la première année d’utilisation, je n’ai pas encore suffisamment de recul mais s’équiper de cet outil est un moyen de montrer que les agriculteurs sont sensibles au sujet de l’eau ».
Un accompagnement pour la partie administrative
L’association renseigne également les exploitants sur les démarches d’ordre administratives et réglementaires, lors de la création du forage et de l’installation de l’irrigation, pour être conforme à la réglementation.
Un état des lieux va être réalisé auprès des adhérents de l’association pour mieux connaître les prélèvements agricoles sur le département. En fin d’année, une newsletter sera éditée à destination des adhérents afin de les informer sur les obligations de déclaration à faire auprès de l’Agence de l’eau et de la police de l’eau. Les agriculteurs et éleveurs sont également informés régulièrement de l’évolution de l’arrêté-cadre sécheresse. •
La récupération des eaux de pluies pour irriguer est une alternative, en particulier pour les maraîchers. Basé dans l’agglomération rouennaise, SV Eau travaille aux solutions de valorisation de l’eau de pluie. « L’opportunité existe. Si on part d’une année à pluviométrie normale, c’est-à-dire 850 mm, cela permet de récupérer 850 litres par an par m2 de toiture. Il faut bien sûr une surface de collecte disponible et être en serre rigide. Ensuite peu importe la technologie de la cuve et le système de surpression d’eau pour alimenter le réseau d’arrosage », explique Thomas Pasdeloup, gérant de SV Eau.
François Lesage, maraîcher à Saint-Ouen-du-Tilleul, utilise l’eau de pluie pour irriguer ses légumes depuis 2003. La récupération est installée au niveau de la toiture de sa maison et de ses 1 000 m2 de serres. « Jusque-là ma réserve de 200 m3 suffisait. Cela correspond à un mois sans pluie. Aujourd’hui cette situation devient de plus en plus fréquente et cette année mon bassin était vide fin juin. L’eau du réseau est venue à la rescousse pour juillet et août », explique le maraîcher qui envisage donc d’augmenter sa capacité de stockage des eaux de pluie avec l’installation d’une poche fermée pour éviter les pertes par évaporation. Depuis cette année, il s’est équipé de tensiomètres Stelzner qui mesurent le niveau d’humidité du sol à l’aide de la tension de succion. « Il s’agit d’un tube de plastique avec un embout à base d’argile poreuse. De l’autre côté, un cadran mesure la dépression. On remplit le tube d’eau et on l’enfonce dans le sol, à 30 cm. Si le sol est gorgé d’eau, l’eau du tube ne passe pas au travers de l’argile. Si le sol est sec, l’eau passe au travers de l’argile. Cela crée une micro-dépression qui fait varier l’aiguille du cadran. Cette dépression est une mesure de l’humidité du sol qui me permet de savoir très rapidement si je dois irriguer ou pas. Jusqu’à présent, j’estimais l’humidité en passant la main sous la bâche. Ce n’était pas précis et je me suis aperçu que j’arrosais trop, surtout les tomates et les aubergines. Je n’ai pas encore assez de recul pour donner des chiffres précis mais je suis sûr qu’il y a moins de gaspillage d’eau ».