Moins de plants de pomme de terre
Face à une hausse des coûts de production, de collecte et de distribution, la filière plants de pomme de terre redoute un recul de la production de 10 à 15 %. Témoignage du dirigeant de Solana France Yannick Lefèvre.
Face à une hausse des coûts de production, de collecte et de distribution, la filière plants de pomme de terre redoute un recul de la production de 10 à 15 %. Témoignage du dirigeant de Solana France Yannick Lefèvre.
« L’ensemble de l’économie française est touché par une crise économique et énergétique sans précédent et la filière plant n’y échappe pas : les coûts de production, de collecte et de distribution des plants de pomme de terre ont explosé », alertait en décembre Semae (ex Gnis, interprofession semences et plants). La filière demande « une répercussion équitable de la hausse des coûts et une meilleure répartition de la valeur tout au long de la filière pomme de terre tout en préservant le pouvoir d’achat des consommateurs finaux ».
Dirigeant de Solana France (collecteur et obtenteurs de plants de pomme de terre), Yannick Lefèvre s’attend à faire face à une année en recul en termes de production. « L’ensemble des collecteurs vont effectuer une baisse des surfaces, le plus souvent volontaire », observe-t-il. En raison de la hausse des prix de revient des plants « jusqu’à un tiers du coût de production de la pomme de terre », et de la concurrence d’autres cultures. Mais aussi en réponse au risque d’invendus croissant, « une perte d’argent qui réduit la possibilité de rémunération aux producteurs ».
Basé dans la Marne, Solana compte une vingtaine de multiplicateurs en France et au total 500 ha de multiplication sur ses variétés dans l’Hexagone. « L’année 2022 n’a pas été catastrophique en rendements, malgré la sécheresse, on est resté dans la moyenne avec 30 t/ha », souligne le dirigeant. Un chiffre toujours inférieur à celui de la pomme de terre de consommation (50 t/ha) en raison de la densité de plantation deux fois plus importante à 70 000 - 80 000 tubercules/ha « et de la limitation de la taille du tubercule à 50 mm ». Sur le plan national, la production de plants a reculé de 10 à 15 % en 2022.
Coûts de production + 70 à 80 %
Les coûts de stockage pour les producteurs sont passés de 40 €/t à 70 €/t. « Une augmentation de 30 €/t due à la hausse de l’électricité mais pas seulement, il y a aussi la manutention, le bois pour les caisses… Au final, la hausse est de 70 à 80 % ». Le poste énergie (+300 % attendus en 2023) est un point critique, « certains agriculteurs n’ont pas pu contractualiser la fourniture d’électricité et ils se retrouvent comme les boulangers devant un mur avec des prix qui flambent ; quand ils peuvent trouver des offres de contrat d’énergie ».
Si certains marchés absorbent le surcoût, ça n’est pas le cas pour les planteurs qui ont contractualisé avec l’industrie, en frite industrielle par exemple. Chaque maillon voulant préserver ses marges, la hausse se fait pour finir sur le prix de vente au consommateur. Mais la filière plant a du mal à répercuter la hausse des coûts de production. Ce n’est pas le cas en pomme de terre de consommation, même si le marché est fluctuant et que l'offre doit s’adapter à la demande. « On ne décide pas du prix du plant, c’est le marché qui décide » souligne Yannick Lefèvre.
Baisse des emblavements
« Les cultures concurrentielles sont un vrai problème », observe le dirigeant. Si le blé flambe, l'intérêt pour les plants recule. Par ailleurs, la filière ne peut pas s’aligner face au prix d’une pomme de terre pour l’industrie. Dans ce contexte, le dirigeant redoute une baisse d’au moins 10 % des emblavements « et peut-être 15 % » sur la zone du comité Nord qui comptait 16 000 ha de plants en 2022. Et le manque de disponibilité en eau pourrait affecter les rendements. •
La France n° 2 mondial
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