De nouvelles perspectives pour la bioéconomie en Normandie
À l'occasion d'une réunion organisée le 16 janvier par l'antenne de Fauville-en-Caux de la Chambre d'agriculture départementale, des experts, entrepreneurs et chercheurs, ont témoigné de leurs actions en faveur de la bioéconomie sur le territoire seinomarin. De nombreux débouchés industriels sont à la clé.
À l'occasion d'une réunion organisée le 16 janvier par l'antenne de Fauville-en-Caux de la Chambre d'agriculture départementale, des experts, entrepreneurs et chercheurs, ont témoigné de leurs actions en faveur de la bioéconomie sur le territoire seinomarin. De nombreux débouchés industriels sont à la clé.

Explorer des solutions innovantes et imaginer des voies pour accélérer la transition vers une économie plus verte, plus résiliente mais également rémunératrice, tel est l'objectif sur lequel travaillent l'ensemble des acteurs présents ce 16 janvier à Fauville-en-Caux.
Une nouvelle valorisation du blé
La coopérative Tereos et la société belge Futerro sont venues présenter leur partenariat pour une nouvelle valorisation du blé. Futerro est une entreprise belge active dans le secteur de la bioéconomie, spécialisée dans la production de PLA (acide polylactique), un biopolymère recyclable à l'infini, biosourcé et industriellement compostable. " L'idée de base de Futerro était de réinventer le monde des plastiques en changeant un mode de production. " " En 1992, l'entreprise a commencé par la fermentation par l'acide lactique qui a été au cœur de différentes applications, en particulier dans l'agroalimentaire. C'est un conservateur naturel. L'idée il y a 30 ans, c'était déjà de développer l'acide polylactique ", explique Geoffroy Delvinquier de Futerro.
Futerro va implanter une bioraffinerie à Saint-Jean-de-Folleville qui sera opérationnelle en 2027-2028. L'usine s'approvisionnera auprès de Tereos Lillebonne qui transforme 800 000 tonnes de blé par an. L'un des coproduits du process de transformation du blé, le sirop de glucose (par saccharification du lait d'amidon) deviendra matière première pour la fabrication du biopolymère qui remplacera les plastiques issus de la pétrochimie dans de nombreux usages. " L'idée est l'obtention d'acide lactique à partir de la fermentation du sirop de glucose. Par polymérisation, cet acide lactique sera transformé en un polymère biosourcé qui ne produit pas de microplastiques persistant dans l'environnement. Cette unité va permettre 250 emplois directs et jusqu'à 900 emplois indirects pour un projet d'investissement de 500 millions d'euros. L'objectif est d'atteindre une production annuelle de 75 000 tonnes de ce plastique biosourcé à destination des marchés européens et français ".
Les biocarburants avancés
Le projet Carbobio, à l'initiative du centre de recherche de l'IFP Énergies Nouvelles en partenariat avec la Chambre d'agriculture de Normandie, Euralis et l'Inrae, concerne le développement des biocarburants avancés. " Il s'agit de passer à des ressources qui ont la capacité de s'affranchir de la compétition avec l'alimentaire : ce sont des résidus agricoles ou forestiers, c'est-à-dire de la biomasse lignocellulosique. Nous montrons de plus en plus d'intérêt pour les cultures dédiées et les cultures pérennes telles que le miscanthus, le taillis à courte rotation (TCR) saule, le TCR peupliers qui produisent beaucoup de lignocellulose ", explique Daphné Lorne, ingénieur économistes bioénergies à IFP Énergies Nouvelles. Au final deux voies apparaissent :
- une voie thermochimique (gazéification) qui transforme les résidus agricoles en hydrocarbures qui sont mélangés au gazole sans limitation d'incorporation (biodiesel de synthèse BTL) ;
- et une voie biochimique (hydrolyse enzymatique) qui transforme des cultures dédiées en éthanol qui est mélangé à l'essence jusqu'à 85 % du volume (éthanol 2G).
Ces deux voies de recherche, la voie biotifuel et la voie Futurol, vont dorénavant faire l'objet de premiers développements industriels. " Le projet Carbobio est de trouver le meilleur moyen de mobiliser de la biomasse lignocellulosique pour produire ces biocarburants avancés. Ce projet a démarré en début d'année 2025. Nous avons choisi deux territoires d'études, la Normandie et le Sud-Ouest. L'idée est d'identifier des systèmes de cultures et des itinéraires techniques de production de ces ressources qui minimisent le plus possible les impacts environnementaux sur l'eau, l'air et les sols. Il faudra donc ensuite sélectionner et valider des systèmes candidats, évaluer d'éventuelles rétributions économiques pour le monde agricole et forestier. Enfin, il faudra voir comment les territoires peuvent s'approprier ces nouvelles filières ". Ce projet est financé en grande partie par l'Ademe.
Le lin composite
Invitée également, la coopérative Terre de Lin a présenté les travaux de sa filiale TDL dédiée au marché du composite. " Cela fait 15 ans que TDL investit dans les composites, et aujourd'hui, de plus en plus d'industriels voient dans le lin des propriétés techniques intéressantes et un moyen de participer à la baisse de l'empreinte carbone en l'intégrant dans leurs applications, explique Anne Nizery, responsable marketing chez Terre de Lin. Aujourd'hui la filière se structure et de plus en plus d'opérateurs maîtrisent le lin et savent l'intégrer dans leurs produits, dans le secteur du sport (ski Salomon, casque de vélo Egid3, bateau We Explore), du loisir (enceintes focales), des mobilités (aéronautique, automobile), du mobilier (table Saintluc). Les dômes des colonnes Morris à Paris sont par exemple composés de fibres de lin et la grande distribution s'y intéresse pour ses présentoirs ".•