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Environnement
Un 7e plan Nitrates qui laisse dubitatif

Pour les ONG comme pour la profession agricole, les textes détaillant le nouveau programme national dédié aux nitrates, en consultation jusqu’à fin août, apportent plus de complexité que d’efficacité. Et au-delà de désaccords sur les mesures précises, ce nouveau plan marque pour l’ensemble des acteurs l’essoufflement des possibilités du cadre réglementaire sur cet épineux dossier.

Enfouissement d’une culture intermédiaire. Après la publication des textes officiels, chaque région devra décliner le cadre national, tout en choisissant des mesures sur les zones d’actions renforcées locales.
© V. Marmuse/CAIA


Une fois n’est pas coutume, la FNSEA et Eaux et rivières de Bretagne utilisent exactement le même vocabulaire. « On est arrivés au bout s’agissant du réglementaire », déplore Thierry Coué, président de la FRSEA bretonne, et référent national pour le syndicat majoritaire sur les nitrates. « On arrive au bout de ces plans et de cette réglementation avec des dispositifs trop complexes », regrette de son côté Estelle Le Guern, chargée de mission agriculture au sein de l’ONG.
À l’origine de leur déception : les trois textes récemment soumis à consultation publique par les ministères de l’Agriculture et de la Transition écologique. Deux arrêtés et un décret publié courant juillet détaillant le cadre national, orientant sa déclinaison en plans régionaux, et prévoyant de nouvelles mesures dans les « zones d’actions renforcées ». L’ensemble formant le septième programme d’action Nitrates sur la période 2022-2026, visant à atteindre le bon état des eaux sur le territoire, comme prévu par la directive européenne de 1997.
Autre point d’accord entre la FNSEA et Eaux et rivières de Bretagne : une incompréhension sur le calendrier de la révision. Après le début des échanges avec le gouvernement en 2020, et le lancement d’une consultation publique sous l’égide de la Commission nationale du débat public, les discussions se sont arrêtées à l’automne 2021, à la veille des échéances électorales. Et la parution subite des textes, alors que la plupart des Français s’apprêtent à partir en vacances, a d’autant plus surpris.

Divergences sur le contenu des mesures

Les acteurs divergent en revanche sur la nouvelle orientation prise par ce septième plan. Thierry Coué regrette de son côté « un durcissement du dispositif ». Face aux déceptions du syndicalisme majoritaire sur la méthode comme sur le fond, « il aurait mieux valu reconduire le sixième plan en lançant des expérimentations », estime l’élu. Car l’appel à manifestation d’intérêt Innov’Azote, déplore-t-il, ne devrait pas livrer ses résultats avant 2024. Chez Eaux et rivières de Bretagne, Estelle Le Guern regrette de son côté un « toilettage du sixième plan », auquel l’ONG aurait préféré des mesures plus claires, « comme la limitation de l’azote total ».
Dans le détail, plusieurs changements dans le programme national pourraient avoir des conséquences concrètes sur le terrain.
Principale inquiétude du syndicalisme majoritaire : l’imposition d’un seuil national d’argile pour les dérogations sur les intercultures longues, qui pourrait pénaliser l’Occitanie et les Hauts-de-France. Par ailleurs, alors que le calendrier d’épandage a été révisé avec l’introduction de nouvelles cultures, et que de nouvelles catégories et critères ont été ajoutés à la nomenclature des fertilisants, « le dispositif est devenu illisible, même pour les spécialistes », tranche Thierry Coué. Seule mesure saluée par la FNSEA : la flexibilité de quinze jours que les préfets pourront accorder pour les épandages en sortie d’hiver.
Par rapport à la copie initiale de l’administration, souligne Estelle Le Guern, le syndicat majoritaire a malgré tout obtenu plusieurs victoires. Alors que la première version du texte prévoyait d’imposer des couverts pour toutes les intercultures courtes, cette condition ne sera imposée qu’au colza. De même, le plafond d’épandage introduit sur les prairies aurait aussi été revu significativement à la hausse. À l’inverse, et malgré les alertes du rapport de l’Autorité environnementale, le septième plan ouvre de nouvelles dérogations, et « ne comporte toujours aucune mesure sur la qualité de l’air », regrette Estelle Le Guern.

Les plans régionaux en ligne de mire

Seul motif d’optimisme côté ONG : la révision du seuil des zones d’action renforcées. Passant de 50 à 40 mg de nitrates par litre, ce seuil révisé pourrait entraîner la mise en place de mesures durcies dans de nombreux territoires, en fonction de la volonté des préfets. Et si la Bretagne bénéficie déjà d’un cadre plutôt lourd en matière de nitrates, cette mesure-là pourrait s’avérer significative, selon l’ONG comme selon la profession. « Nous voulons discuter là-dessus, et plus généralement sur la définition des zones vulnérables », prévient Thierry Coué.
Le syndicalisme majoritaire, confie-t-il, s’est d’ailleurs mis en ordre de bataille. Mais au-delà de ce cadre national, les discussions sont loin d’être terminées. Car après la publication des textes officiels, chaque région devra décliner le cadre national, tout en choisissant des mesures sur les zones d’actions renforcées locales. Des discussions déjà houleuses en Bretagne, rappelle Thierry Coué, alors que les syndicalistes locaux ont boycotté plusieurs réunions.
Eaux et rivières de Bretagne s’est préparée elle aussi aux négociations locales, tout en prévoyant d’attaquer le cadre national par rapport aux remarques de l’Autorité environnementale comme des inspections ministérielles. Mais l’association n’oublie pas non plus le sixième plan, dont elle a dénoncé la version bretonne, notamment pour son manque de prise en compte des algues vertes. « Nous avons obtenu des mesures spéciales dans les baies, qui devraient être prises en compte dès septembre 2022 », rappelle Estelle Le Guern. Tout en envisageant déjà comment ces mesures pourraient intégrer le septième plan, qui s’appliquera à partir de septembre 2023. •

 

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